[fivecol_three_first]ABSTRACT
L’analyse de réseau ne transforme pas nos objets d’étude, elle transforme le regard que le chercheur porte sur ceux-ci. Organisée en réseau, l’information devient relationnelle. Elle rend possible en puissance la création d’une nouvelle connaissance, à l’image d’une encyclopédie dont les liens entre les notices tissent une toile dont on peut analyser les caractéristiques structurelles ou d’un répertoire d’archives qui voit sa hiérarchie bouleversée par un index qui recompose le réseau d’échange d’information à l’intérieur d’un groupe de personnes. Sur la base de deux exemples d’outils de gestion, conservation et valorisation de la connaissance, l’encyclopédie en ligne Wikipédia et les archives de la coopération intellectuelle de la Société des Nations, cet article questionne le rapport entre le chercheur et son objet compris comme une globalité dont il devient possible d’avoir une vue d’ensemble.
COMMENTAIRE
L’agrégation de multiples données conduit-elle à la création d’une nouvelle “donnée”, dans une perspective holistique où l’ensemble est supérieur à la somme de ses parties ? Dans cet article, que je soumets ici à vos commentaires, je tente de montrer que notre connaissance d’un objet d’étude est effectivement améliorée par la mise en réseau des pièces du puzzle. Une encyclopédie en ligne comme Wikipédia n’est pas seulement un outil qui documente des petites parcelles du savoir globalisé de l’humanité, mais un outil qui permet au lecteur une navigation propre à lui permettre d’en saisir un sens plus général.
Dans une seconde partie, j’y décris également plus en détail un aspect méthodologique de mes recherches actuelles : la structuration des métadonnées de documents d’archive sous la forme d’un réseau qui en permet une exploitation intéressante. Les historiens n’ont-ils pas à tirer parti de cette “vue globale” d’un fonds d’archives plutôt que de se contenter de quelques documents saillants ? C’est parfois dans les marges peu valorisées d’un réseau que se trouvent les perles.
[/fivecol_three_first][fivecol_two_last]ARTICLE
Grandjean, Martin |
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Dans le même numéro, je vous invite à lire également les contributions suivantes :
- Rochat Y. et Kaplan F., “Analyse des réseaux de personnages dans Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau“, pp. 109-133.
- Le Deuff O., “Translittératie et transmedia. Quelles compétences pour de nouvelles productions « délivrées » ?“, pp. 55-72.
Ainsi qu’une sélection de ressources et articles en ligne que je cite : Sibille C., “LONSEA – Der Völkerbund in neuer sicht“, 2011. / Müller B., “Documentation et sciences sociales“, 2013. / Dacos M., “Vers des médias numériques en sciences humaines et sociales“, 2012. / Eom Y.-H. et al., “Time evolution of Wikipedia network ranking“, 2013. / Laqua D. “Internationalisme ou affirmation de la nation ?“, 2011. / Raper S., “Graphing the History of Philosophy“, 2012.
Et n’hésitez pas à me faire part de vos remarques dans les commentaires ci-dessous !
Bonjour,
Merci pour ce billet.
Pour la visualisation arborescente du plan de classement du fonds de la CICI, tu es partie du fichier XML-EAD ? Et si oui, qu’as-tu utilisé par avoir des données “utilisables” dans Gephi ?
Personnellement ce type de visualisation est intéressante pour deux cas, à savoir pour les historiens en tant que mode d’exploration, mais également par les archivistes en tant qu’outils pour la compréhension de la constitution des niveaux de description du fonds.
Merci d’avance,
Antoine
Merci pour cette réaction !
Non, cette visualisation arborescente repose sur un répertoire de fonds/sous-fonds/dossiers… que j’ai moi-même établi. Ceci dit, si mon travail et celui des archivistes de l’ONU est bien fait, le résultat devrait être le même, à la différence près que je descends à un “étage” inférieur puisque les dossiers ne sont pas décrits individuellement par les catalogues SDN. A noter également que les données utilisées pour cet article ne concernent qu’une portion du fonds.
En ce qui concerne la visualisation, il “suffit” d’avoir une liste arborescente où le dossierXYZ appartient au sous-fondsPQR, qui appartient lui-même au fondsABC, puis en extraire ces “couples” à importer dans Gephi.
Je rejoins tout à fait la conception selon laquelle ce genre d’expérimentation est probablement plus proche du travail archivistique qu’historique, mais je ne peux en juger que depuis le point de vue de l’historien.
Salut Martin (tu permets que je te tutoies ?),
Dans ton article en lien, tu as le mérite de ne pas annoncer de miracle en tirant des conclusions hâtives du réseau que tu as construit, comme cela se fait trop souvent. En même temps, tu proposes de ne pas rester passif : sur une immense base de données, tu proposes une visualisation là où d’ordinaire on se contente d’un tableau d’une bonne longueur dont on ne peut rien faire si ce n’est étudier des cas particuliers, et à propos duquel on ne comprendrait pas, à la lecture de l’article qui irait avec, quel est l’objet d’étude, sa taille, sa structure, etc.
En faire une visualisation est une bonne chose, mais il ne faut pas se limiter à ça. Tu décris quelques méthodes pour l’explorer, et là j’aurais deux questions :
– Quelle interface utilises-tu ou recommandes-tu pour explorer pareil répertoire d’archive ?
– On sent dans ta conclusion un aller-retour un peu “oui-mais-non” entre utilisation du réseau pour une “analyse confirmatoire” et mise en garde contre celle-ci. À ton avis, va-t-on pouvoir développer des méthodes pour pouvoir réaliser systématiquement une telle analyse, ou est-ce vraiment à étudier au cas par cas… ?
Une dernière question : recommandes-tu cette méthode d’exploration pour tout répertoire d’archives, ou celui de la SDN est-il un cas particulier ?
Merci pour cette lecture attentive !
Je réponds aux questions une par une :
– Actuellement, je ne suis pas en mesure de recommander une interface clé-en-mains parce que celle-ci n’existe pas, ni sur le marché, ni comme produit de mes expérimentations. Concentré sur la recherche, je n’ai pas encore pris le temps de mettre en place une solution qui permettrait de naviguer entre une interface de BDD relationnelle et un réseau interactif. J’ai récemment rencontré l’équipe de NodeGoat, qui s’oriente dans cette direction.
– Non, l’aspect systématique n’est à mon avis pas possible ni souhaitable en terme de qualité de la recherche historique. Toutes les données ont besoin de questions de recherches adaptées – et donc de solutions différentes. Ceci étant, je crois que penser en termes de réseau est une façon de poser de nouvelles questions à des sources : si l’historien s’en saisit, il y a de bonnes raisons de penser que c’est pour aller plus loin que de l'”analyse confirmatoire”.
– Tous les répertoires d’archives ne se prêtent pas à ce genre de méthode puisque tous ne contiennent pas des documents qui témoignent d’échanges entre des individus. Et de rappeler que je ne travaille pas sur les répertoires d’archives disponibles mais sur un répertoire qu’il est nécessaire de créer pour l’occasion si l’on veut dépasser la simple visualisation arborescente (voir image ci-dessus) du fonds : les “agents” des documents ne sont quasiment jamais indexés par les institutions d’archives (ou très partiellement).
Bonjour,
comment est il possible de construire un sociogramme a partir de son réseau FB ou Linkedin ?
Christophe
Bonjour, en 2013 j’avais produit un tutoriel pour produire un réseau à partir de son compte Facebook (tutoriel 2013 ici), mais il est fort probable que l’application (myfnetwork) qui permettait de télécharger les données n’est plus à jour. Il doit en exister plusieurs autres (que je n’ai pas recensé récemment, malheureusement). Une fois le téléchargement de ce fichier effectué, ces données peuvent généralement être visualisées avec Gephi (voir tutoriel 2015 ici).